Martine Cros
Des êtres presque nus
dans des lieux enfoncés
cherchent un visage
Hommes Femmes ou encore aucun d’eux
s’aiment
s’égarent s’aiment
Seule, une tragédie vive les revêt
Est ce un lambeau dece qu’ils furent-fuient,d’eux quelque fange
inévaporée...
Aline Royer
il n’est pas de sommeil
qui ne s’agite sous le sable et vienne te mordre au cou et fouir dans l’oreille jusqu’à te sucer les yeux par derrière
il n’est pas de sommeil qui ne vienne par derrière te sucer les yeux et tourner sous ton crâne comme un ver aveuglé jusqu’à tordre tes tempes...
Xavier Frandon
La magnanimité
Les oiseaux qui cherchent
Et des nuits
Des nuits sans médication
Que la chaleur orangée d’une mitre stupide...
Qu’envahissent les alléchantes solives
Gérard Leyzieux
Quelques efforts frileux et mal venus
Pour s’imaginer l’été dans le froid
Et l’attente force le frimas du partir
Forêt d’étoiles sur le gel, file ma voix
Une fugue qu’il nous faut invariablement suivre
Tout au long de la farandole de notre existence
Par-delà les tremblements de nos corps trop souvent polaires
Guillaume
Krempp
Où sont les poèmes révolutionnaires
Les bistrots bruyants aux airs de
Communes
Perdus dans les ombres, passé de brume
Les barricades pavent à
nouveau les Enfers...
Frange hivernale sur le front
Capitales léthargiques

Frédéric Dechaux
Réflexions anodines
L’inconsistance lui servait de structure psychique. Chaque interlocuteur avait pour fonction de le confronter à son propre néant. Il n’avait pas la force d’exister en présence de quelqu’un.
Léo Fouquey
Quand l’ambroisie terrible de l’horreur saisit de ses membres tremblant le troupeau qui l’assiège, le désir noir d’un instant d’altérité accable la conscience de son poids musical : l’aurore.
Aymeric Le Guillou
les arbres y meurent
Sur les tentures la pierre blanche
Les mots semés à la mansarde
Coulent ensemble derrière le monde
Canal Tiers-Monde la solitude
Des filles qui lavent des enfants gris
Lampedusa
Calvaire en bois
René Chabrière
Le ciel est tout autour d’eux
C’est l’effort d’une longue marche
A travers les dunes ;
Il y a les ombres qui devancent
La caravane et le sable
Qui ondule, égal à lui-même
Et juste marqué, de grains de rochers
Anna Jouy
Approcher cette sébile d’ombre, une offrande à y poser, une obole à laisser là, pour tout compte d’oubli. Espérer que cela calmera le destin, les sortilèges sphinx, la bourse ou la vie… ?
Catherine Ferrari
Fragment nocturne
Dans la nuit je t'ai vue marcher pieds nus
sur le corps sombre et humide de la Terre.
J'ai vu la cime fière de la montagne
Jean-Pierre Parra
Réveillé
mémoire perdue et rêves enfuis
dans ton cœur détruit
tu marches
dos rond
sous l'averse des rayons de lumière
qui raturent ton ombre...
Clément Velluet
Des soleils mangeant les larmes des nénuphars, des hypothèques, aux nues des violoncelles physiques, des absences, de calvities sur les routes crépusculaires
Antoine Maine
D'elle ou de lui qui repoussa la porte
A qui cette main posée sur le battant
Dans les veines encore la sève qui coule
De cette vie-là et d'une autre vie
Contre la clôture s'efforce le vent
Souffle sa peine en langage animal
Ici donc commence la nuit du dehors
Il y avait un jardin comme un monde
En plus petit peuplé d'arbres à l'écorce...
Fabrice Farre
Les journées dépareillées comme un jeu de couverts,
rassemblé par hasard autour de l'assiette,
la saison sifflante à la porte,
où les pas sont ceux du regard...
Estelle Fenzy
Tu dis je rayonne – brûle
tu tisonnes les mots - tentatives
combustibles à mon oreille
Tu pyromanes alors...
Jean Leznod
Partir, c’est fuir, mais rester, c’est risquer de s’agglutiner et de se ramollir. L’idéal serait de trouver un juste milieu entre les deux.
Patrick Boutin
La rime
Est un crime
Passionnel
Surtout si la rime est embrassée.
Chloé Charpentier
regarde-moi
dans le blanc de l’oeil
comme je danse au-dessus des rangs d’oignons que des dents ont plantés
et les sillons de terre que la pluie a creusés
comme je bats des mains sous chaque poussière d’ici-bas
et chaque ombre projetée par de hautes statures
regarde
Richard Taillefer
Ma vie, se résume à d’émouvantes banalités sommaires. Je tourne en rond dans ma cage, tel un rat d’église dans un coin. Hésitant, sans cesse, je ne publipostage mes doutes avec qui que ce soit. Tiraillé par d’innombrables lâchetés, je me tiens en retrait de tout et de tous, n’éprouvant aucun remord coupable. Avec le temps et par grande habitude, l’ennui devient plus humain
Sandrine Cuzzucoli
dans le dos des jeunes filles
les faucheuses des peintres
s'en vont se distraire...
de loin notre table dressée dans la vallée un don le seuil d'un temple à ciel ouvert
puis l'unisson de certains battements vers le bas-centre
de nos corps
Caroline Coppé
J’ai compris, tardivement dans ma vie d’adulte, que tout le monde ne méritait pas ma sincérité, ni mon authenticité. Cela fut un choc. La sincérité est tellement visible sur un visage. Elle se concentre dans une mimique peu travaillée. Comment, dès lors, la réserver à certains, la cacher à d’autres ?
Jacques Cauda
Le bain de siège a commencé /Il déshabille tranche mord /Détache puis avale les morceaux vitaux /« Dieu soit avec elle ! » crie-t-il /La forêt tremble/Les arbres reverdiront plus tard/Mais en attendant le vent sème la faim/Et l’assaut est vite conclu.
Ghyslaine Leloup
Un homme qui a faim
Son regard loin en dedans
Un effroi très doux qui éblouit
Un regard qui a faim
D’un autre regard
Qui serait à hauteur d’homme
Conjuration du sourire
Quand je regarde les hommes
Je ne vois que leur tremblement
Rodrigue Lavallé
étendue des silences
étendues
des visages
on
se heurte à la
coïncidence des pierres
murs
monticules
graffitis
nous passons
Zakane
(Je connais peu de choses. Je ne sais que le trop du peu. La table de l'enfance m'a vite oublié. Préférence d'herbes hautes et d'arbres pleinement ouverts. Mon école, le chemin. Je me souviens des neiges parce que nous creusions le sol pour préparer l'hiver.
Angèle Casanova
tu regardes par le trou l’appareil te mesure ton œil agrandi à l’extrême semble une porte sur rien il te mesure par grands éclairs et tu comptes et tu ânonnes
Philippe Vallet
Cherche l'étoile pourpre
sous tes paupières
l'invisible chuchote
chaque mot est une effraction
un battement
un source où vibre le signe
de ta présence
Lou Coutet
Il y a le chien assis à coté de nous
Il y a la pluie crachant
Sur nos yeux grands ouverts
Il y a les visages, les mains,
Les cafés, les angles de rues
Tous les lieux connus
Fabien Pio
épulsion désir face
à la nécessité
ou à la faim
de scruter plus bas
interroger les sédiments
Christophe Esnault
Hermine Raynaud
Terre dans les yeux. Le nez, la bouche cherchent encore, achèvent l’air plaqué au sable. Lèche le sel épuisé de la peau, langue tourne cherche la lampée d’air qu’il reste forcément quelque part peut être plus loin dans la terre creusent les ongles.
Il fut un temps où la lumière était la seule chose à trouver. La vraie, la pleine lumière que d’autres ont connue – nous n’avons jamais vu la lumière, et ceux que le manque de ce qu’ils n’avaient pas connu n’a achevé ont survécu.
Catherine Serre
&
C'est précis
Une dentelle
Précis
Un instant
Fatal
C'est précis
Plus tard nos oreilles sauront l'instant
Utiliser pour tremplin (afin de s’élancer dans le vide) des mots pris*dans Les Œuvres Complètes d’Antonin Artaud. Procéder à une séparation (Artaud, le séparé) des mots du texte avant d’opérer un assemblage (associations improbables). Un assemblage remanié successivement qui privilégie la sonorité au détriment du sens.
Ananda Doe
Sur la terre immobile
ce soleil déplacé
d’où les chants sont absents
Isabelle Bonat-Luciani
Quand tu mourras je serai ton ombre.
Comme on a vécu.
Je verrai ton nom
Je verrai ton visage
Amélie Guyot
Mathieu Crochet
les villes dedans
tout est sur trottoir
avec ces jardins condamnés
à voir leurs nuits enfermées
malgré les murs les portes vaines
Vers la route du Hoc. Par-delà cette butte le marais et les prés-salés. Ses laiches et ses réseaux. Et ses eaux odorantes parfois gonflées par les marées d’équinoxe. Deux fois l’an s’y produit le phénomène du mascaret. Extraordinaire. Front de falaise surplombant la Manche. Lune nouvelle. Souvenir du débarquement.
Joëlle Thienard
Parfois elle filtre
dans un regard,
une attitude, un geste
mieux, un discours
jeté pêle-mêle
au hasard des mots
qui tissent une conversation,
Kenny Ozier-Lafontaine
Le soleil c'est pas l'soleil ! ... i' fait semblant. Il dîne avec des chiens, dort avec des croix. Faut pas croire qu'on achète d'la lumière avec de l'ombre ! Pour de rire, p'tet', pas pour de vrai. Le soleil c'est pas l'soleil !
Marine Gross
Pas de langue à délier
De foule à convoquer
Pas d'abri abritant
Quelques points perdus
Suspendus
Thierry Radière
après la couette prise sur ton corps et remise à ta nuit je soulève sans rien voir l’air du matin et bouge sur le flanc la région de mes rêves
Henri Cachau
Le caprice comme moyen de séduction ou de contestation ?... À cette époque je n’en connaissais pas les réels pouvoirs, j’agissais compulsivement, de mon mieux emmerdais mes parents qui me le rendaient bien, par-dessus mon insignifiante personne s’envoyaient vaisselle et reproches…
Eve de Laudec
Je ne laisse pas trace de mes genoux
Sur vos pierres grises
Seuls des nœuds à mes cheveux
Souviens-moi
Gabriel Henry
Je ne connais pas ces terres par la peau. L'iris d'huile y saigne abondamment à la demande des arbres nourriciers. Je voudrais que tous les rêves d'une aube vierge des sirènes se rejoignent au-dessus de la vieille ville.
Béatrice Machet
Réserve. Stock plutôt que discrétion. Des mots de cruels à tendres. Ils sont à l’affut aux aguets sur le fil de la dignité. A cause de l’enjeu. On le dirait déchaussé : oui comme branlant dans la gencive. Des dents à vomir pour un sourire interminable.
Jean-Christophe Belleveaux
Rien que toi et les pronoms / toujours le poids, tu vois pas que ça pèse ? Le beau désastre dégouline, les tables de la loi s'effritent -paresse ivresse, quel beau couple que ces deux-là !
Myriam OH
"Il y a ceux qui voient le verre à moitié vide, et ceux qui le remplissent ; il y a ceux qui voient le verre à moitié plein, et ceux qui le boivent. Qu'importe la tronche de la réalité, pourvu que l'ivresse la lui refasse de temps en temps
François Vinsot
Découvrir que la tristesse est inversement proportionnelle au bonheur espéré lorsque l'équation possède trop d'inconnus et de variables.
Christophe Bregaint
En orbite
Autour d’un parterre
De chrysanthèmes fanés
Cent et cent fois
Gaëtan Lecoq
Noircir nos mains à l’ultime combat
Courir à jamais au devant des brisants
Toucher le clair obscur de nos déveines
S'enthousiasmer d’une île comme seul havre et seule terre
Jaillir du feu pour connaître son cœur
Et lutter pour vibrer toujours
Adeline Giustinati-Miermont
Premier élément première lettre début de l'alphabet
Le monde s'arrache au néant
Au noir
Noir de l'eau
H2O
Luminitza C. Tigirlas
L’Attente exige rente à perpétuité
– nidifier reste à part –
Le Ciel excédé envoie frelons
– temps drôle de la superbe –
Yannick Torlini
à cette guerre, à cette guerre sans nous, sans personne, à cette guerre nous laisserons tout. à cette guerre nous laisserons nos corps las, nos pensées inquiètes...
Nadia Gilard
Sous l’eau noire, profonde ; infirme, l’immobile et l’informe silence. Comme un goût de vieux dires, le passé aux épaules revient boucler. Lancinant et étouffant, inscrit aux tissus de mes entrailles.
Flora Botta
Et nous cherchions,
la mer aux veines,
le voyage à rebours,
la sainte eau des sauvages,
la sagesse des tribus
n o m a d e s.
Emilie Voillot
À hurler sans
Souffler les mêmes refrains ou Freins de pacotille je me
Tue et me
Tâche.
Cathy Garcia
ton large sourire
un gouffre
y boire le jus brûlant
du désir
en sucer les dents
jolis cailloux glacés
les parois sont glissantes
nos yeux des diamants